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Juridique

Le prêt et la condition suspensive de prêt lors de l'acquisition d'un bien immobilier

Le 15 Février 2023
Le prêt et la condition suspensive de prêt lors de l'acquisition d'un bien immobilier

Lors de l'acquisition d'un bien immobilier, les acquéreurs particuliers, comme professionnels, ont très souvent recours à un prêt pour financer ladite acquisition. Nous nous intéressons ici aux cas des emprunteurs particuliers, sachant qu'une partie des informations données, sont également applicables aux professionnels.

 

Le prêt immobilier est un financement octroyé par une banque, dont l'objet est l'acquisition d'un bien immobilier à usage d'habitation avec ou sans travaux, d’un terrain destiné à la construction d'un bien à usage d'habitation et/ou les constructions à ériger sur ce bien.

Il existe différents prêts immobiliers mais tous sont soumis à la même règle du respect du droit de rétractation, qui peut s'exercer dans un délai de 10 jours calendaires à compter de la date de signature de l'offre de prêt. Cela permet aux acquéreurs de pouvoir consulter et étudier l'offre de prêt avant de s'engager.

 

Un prêt immobilier est assorti d'une garantie. Celle-ci peut être une simple caution prise par l'organisme prêteur. Dans cette hypothèse, en cas de défaut de paiement de l'emprunteur, la caution assurera le paiement des échéances, à charge pour elle de se retourner par la suite contre l'emprunteur. Les frais de dossiers sont généralement un peu plus élevés au moment de la signature de l'offre de prêt, mais il n'y aura aucune mainlevée à effectuer, puisqu'aucune inscription n'est prise, donc aucun autre frais ne sera à verser par la suite.

La banque peut également avoir recours à une hypothèque spéciale du prêteur de deniers (anciennement privilège du prêteur de deniers), lors de l'acquisition d'un bien existant. Dans cette hypothèse, en cas de défaut de paiement de l'emprunteur, la banque peut à terme, vendre le bien immobilier objet du prêt. Une inscription est prise par le notaire dans l'acte de vente ou de prêt et figure au fichier immobilier du service de publicité foncière. Une mainlevée sera nécessaire pour lever l'inscription, si le bien est vendu avant la fin du prêt par exemple. La prise de garantie et la mainlevée sont à la charge de l'emprunteur.

Enfin, la banque peut avoir recours à une hypothèque conventionnelle afin de garantir un bien immobilier (y compris les terrains constructibles par exemple). En cas de défaut de paiement, la banque peut à terme saisir le bien, afin de se faire rembourser les sommes qui lui sont dues. S'agissant de l'inscription, la procédure est identique à celle de l'hypothèque spéciale du prêteur de deniers.

               

 

Lorsque l'acquéreur signale au notaire qu'il aura recours à un prêt immobilier, ce dernier va insérer dans l'avant-contrat, une condition suspensive d'obtention d'un prêt immobilier.

Cette clause permet aux vendeur et acquéreur de fixer les conditions et les termes de la demande de prêt à effectuer à la suite par l'acquéreur. Elle doit contenir les indications sur le montant à emprunter, la durée d'emprunt et le taux envisagé, et tout cela a minima ou maxima. L'avant-contrat, même contenant cette condition, engage les vendeur et acquéreur. Mais si l'acquéreur ne parvient pas à obtenir le financement et fait face à divers refus de prêt, alors la vente est caduque et les parties sont désengagées, sans que soit retenue une faute. L'acquéreur n'est ainsi pas forcé d'acheter le bien, alors même qu'il n'en aurait pas les moyens financiers.

 

Le vendeur pourra également solliciter lors de la signature d'une promesse le versement d'une indemnité d'immobilisation (compensation de la réservation du logement pendant le délai d'option) ou un dépôt de garantie, dans un compromis (qui engagera un peu plus l'acquéreur).

La somme sera consignée par le notaire, et déduite du prix de vente si l'avant-contrat se réalise, ou restituée si malgré toutes les démarches réalisées, il est impossible de poursuivre la vente. C'est le cas d'un refus de prêt par exemple. Toutefois, l'indemnité ou le dépôt sera conservé par le vendeur, si l'acquéreur se désiste de la vente volontairement, alors que toutes les conditions suspensives sont réalisées.

Aussi, la présence de la clause pénale, insérée dans les compromis, permet l'indemnisation du vendeur ou de l'acquéreur en prévoyant une somme à titre de dommages et intérêts en cas d'inexécution de la vente. Il est donc important qu'un encadrement de la condition suspensive de prêt soit opéré afin qu'en cas de non-réalisation de la vente, le notaire puis le juge, si le conflit se judiciarise, puisse déterminer d'où provient la défaillance. La défaillance volontaire d'une partie entraîne le versement de la somme à l'autre partie.

 

Se posent certaines difficultés concernant la rédaction et le contenu de la clause de condition suspensive de prêt. La majorité des acquéreurs auront, au préalable de leur recherche immobilière, interrogé leur banque pour connaître leur enveloppe budgétaire, mais cela ne saurait qu'être une simple estimation et non pas un montant précis. De plus, cette consultation ne garantit pas l'engagement de la banque. Le plus souvent, plusieurs demandes concomitantes seront nécessaires et permettront d'obtenir l'offre de prêt la plus intéressante.

De fait, les acquéreurs ne savent pas avec exactitude le montant qu'ils pourront emprunter.

Face à cette estimation, un montant maximum d'emprunt est alors indiqué dans la clause. Mais même encadré, des litiges peuvent se créer. Ainsi, la Cour de cassation est régulièrement sollicitée, notamment lorsqu'un prêt a été obtenu sans remplir totalement les conditions prévues à la clause.

 

Dans un arrêt, il a été retenu "qu'un prêt accordé à un montant inférieur au montant maximal prévu est conforme aux stipulations contractuelles" et la défaillance de la clause n'est pas imputable à l'acquéreur (Cass. 3e civ., 14 janv. 2021, n° 20-11224). En l'espèce, l'acquéreur obtient une offre de prêt pour un montant inférieur aux prévisions inscrites dans la clause, mais ne couvre pas la totalité du montant de l'acquisition. Il indique à son vendeur que la vente ne peut se poursuivre. La Cour de cassation indique que l'acquéreur a présenté une offre conforme, même si inférieure au maximum indiqué dans l'avant-contrat. Cela implique que l'exécution de la vente est conditionnée au fait que l'acquéreur puisse payer l'intégralité du prix de vente et les frais liés à cette vente, ce qui n'était pas le cas ici.

 

Plus récemment, il a été jugé que l'indication dans une promesse de vente d'un montant maximal du prêt à obtenir, ne permet pas de contraindre l'acquéreur à accepter une offre d'un montant inférieur (Cass. 3e civ., 14 déc. 2022, no 21-24539). Une décision indiquant que l'acquéreur aurait du accepter une offre d'un montant inférieur, aurait risqué de dénaturer la promesse de vente. En effet, la promesse ne peut obliger l'acquéreur à acheter un bien sous prétexte d'avoir obtenu un prêt dont le montant est à la baisse et de devoir trouver en parallèle une nouvelle source de financement.

 

Les acquéreurs se retrouveraient en difficulté face à l'acquisition. Dans ce cas, la défaillance de la condition suspensive n'est pas imputable à l'acquéreur puisqu'elle résulte du refus de la banque de lui accorder un prêt pour le montant maximal prévu par la promesse. Il ne sera donc pas obligé de verser la clause pénale et pourra récupérer l'éventuelle indemnité d'immobilisation versée au moment de la signature de l'avant-contrat.

 

On peut donc en déduire qu'il serait judicieux de prévoir dans l'avant-contrat, que l'acquéreur puisse faire une demande de prêt pour le montant de son choix mais dans la limite d'un montant maximum.

 

Comme pour le montant, il est impossible pour l'acquéreur de connaitre par avance le taux et la durée du prêt, qui en général dépendent l'un de l'autre. Comme pour le montant empruntable, la banque ne donnera qu'une estimation, qui sera affinée au moment du montage de dossier, en fonction notamment des conditions, du délai retenu et des taux en vigueur.

 

Traditionnellement, il est indiqué dans la clause un taux et une durée maximale.

 

Il parait évident qu'en pratique l'acquéreur fasse une demande de prêt pour une durée qu'il détermine, et que la banque fasse une offre au taux qu'elle souhaite appliquer en fonction de ce délai. L'acquéreur se retrouve donc face à des propositions avec des durées plus courtes ou plus longues, dont le taux varie en fonction des durées proposées, et qui prennent en considérations ses chances d'obtenir un prêt. Il lui appartient d'évaluer l'opportunité de telle ou telle proposition.

 

Il pourrait alors être envisagé que la condition prévoie que l'acquéreur puisse faire une demande de prêt pour la durée de son choix, mais en encadrant le tout par un montant minimum et un montant maximum, et en fonction de l'amplitude de la durée retenue, il serait prévu un ou plusieurs taux maximum. Ainsi, si la banque offrait un prêt pour un taux supérieur au maximum prévu compte tenu de la durée du prêt retenue, la condition sera réputée défaillante.

 

Etant ici précisé que le taux détermine le coût de l'emprunt sur sa durée totale et permet de calculer les intérêts qui seront dus à l'emprunteur.

 

Enfin, il est admis depuis 2008 par la jurisprudence (Cass. 1re civ., 22 mai 2008, n° 07-11719 et 07-12940) qu'il peut être exigé dans la clause de condition suspensive de prêt, que l'acquéreur effectuera plus de deux demandes de prêt et s'adressera donc à plusieurs établissements bancaires, avant de justifier d'un refus de prêt et de retenir la défaillance de la condition et donc la caducité de la vente.

 



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