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Juridique

Absence d'héritier réservataire et testament

Le 20 Juillet 2022
Absence d'héritier réservataire et testament

En France, contrairement à d'autres pays, la loi interdit de déshériter ses enfants et son conjoint, en tant qu’héritiers réservataires.

En effet, ils doivent recevoir a minima la réserve, c'est-à-dire une partie du patrimoine qui leur est alloué légalement et qui ne peut être transmise, par quelque acte que ce soit, à autrui.

Ainsi, seule la quotité disponible, reliquat du patrimoine du défunt au-delà de la réserve, peut faire l'objet de dispositions de dernières volontés.

 

Mais que se passe-t-il lorsque le défunt n'a aucun héritier réservataire ?

 

Prenons l'exemple d'un couple marié, initialement sous la communauté légale, n'ayant finalement jamais eu d'enfant, qui modifie son régime matrimonial afin d’opter pour la communauté universelle.

Au décès de l'épouse, la succession se règle sans difficulté puisque l'entièreté du patrimoine revient à son conjoint. L'époux survivant conserve l'intégralité du patrimoine, et peu de temps après le décès de son épouse, se voit diagnostiquer la maladie d'Alzheimer. Il est donc placé sous mesure de protection, puis décède.

Le mandataire tutélaire saisit le notaire qui avait la charge de ses affaires courantes durant sa vie. Il lui expose la situation : peu de patrimoine immobilier, mais des liquidités ; pas d'enfants, mais des neveux et nièces. Ceux-ci avaient gardé contact mais n’étaient pas très proches de leur oncle dont ils connaissaient la situation financière ; le défunt s'était laissé aller, de son vivant, à quelques confessions lors de leurs derniers échanges.

 

Le notaire est fortement sollicité par les neveux et nièces qui doivent venir à la succession du défunt, alors même que le dossier n'est pas encore ouvert en l'étude.

Il effectue néanmoins un premier rendez-vous afin d'éclaircir la situation, et prend par la même occasion toutes les informations les concernant, tout en restant prudent ; les formalités préalables d'ouverture de la succession n'ayant pas encore pu être effectuées.

 

Lors de la constitution du dossier, le notaire interroge le fichier des dernières volontés et découvre que le défunt avait fait rédiger un testament, qui plus est un testament authentique, valable, puisque rédigé bien avant que sa maladie ne se déclare.

A la lecture, le notaire constate que le défunt a institué comme légataires des associations.

Autrement dit, il ne laisse rien à ses neveux et nièces.

Le contenu du testament ne peut être transmis aux héritiers non réservataires, surtout si le notaire est en présence d'un légataire universel, ce qui peut entraîner une incompréhension chez certains héritiers.

Dans notre cas, le défunt avait ouvertement parlé de sommes importantes et rien ne laissait présager aux neveux qu'ils seraient évincés. En parallèle, les diverses interrogations et investigations confirment un patrimoine conséquent, composé d'une petite maison et surtout de nombreux comptes dans diverses banques, soit au total la somme de 1,5 millions d'euros, d'où la déception, voire la colère des héritiers d’en être privés en raison du testament. Ils en viennent même à suspecter le notaire de cacher des informations et de vouloir accaparer une partie des liquidités.

 

La maison est vendue et le fruit de la vente accompagnée des liquidités présentes sur les comptes sont reversées aux associations.

Les dispositions de dernières volontés du défunt sont respectées, les neveux et nièces évincés.

 

 

En conclusion :

D’une part, étant en présence d'héritiers non réservataires, le défunt était dans la possibilité de les exclure totalement de la succession (contrairement aux héritiers réservataires, qui ne peuvent être privés que de la quotité disponible), et peut faire profiter de la totalité de la succession à des associations ou des personnes autres que des parents.

 

D'autre part, lorsque des héritiers non réservataires se retrouvent face à un testament désignant un légataire universel, ils ne peuvent pas connaître le contenu du testament. Le notaire doit donc garder le secret sur les dispositions du testament.

Toutefois, une procédure existe : il faut effectuer une demande auprès procureur du tribunal judiciaire pour prendre connaissance du contenu du testament, ou intenter une action en justice pour nullité du testament, si l’on estime que le testateur n'avait pas toutes ses facultés au moment de la rédaction.

 



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